Ces écoles pas comme les autres – Peter Gumbel

Si vous aviez le choix, enverriez-vous vos enfants à l’école publique française? Une part croissante des parents répondent clairement non et sont à la recherche d’alternatives. Peter Gumbel nous offre dans son nouveau livre Ces écoles pas comme les autres un catalogue non exhaustif – mais représentatif! – d’établissements qui tentent de sortir du carcan et utilisent d’autres méthodes au service des élèves.

La longue liste des défis auxquels l’école publique française fait face nous est rappelée presque quotidiennement dans les médias: 1 élève sur 4 termine son cursus scolaire sans maîtriser le language, les enseignants sont insatisfaits de leurs conditions de travail, la France se retrouve dans les catacombes des classements internationaux, le tout pour la modeste somme de 65 milliards d’euro par an.

Peter Gumbel

Peter Gumbel, journaliste et écrivain – Crédit photo: Peter Gumbel

Peut-on alors encore prétendre que le système fonctionne ? A en croire Sir Ken Robinson dans son livre Creative schools, une évolution des systèmes scolaires (en France mais aussi dans de nombreux autres pays!) ne peut pas venir de l’État. La bureaucratie est trop lourde, les intérêts trop divergents, le courage politique trop timide. Par contre un vrai changement peut venir de l’accumulation d’initiatives locales (ce que Sir Ken Robinson appelle le grassroot process).

Peter Gumbel a voyagé à travers la France afin de nous faire (re)découvrir certaines des ces initiatives. Celles-ci peuvent être regroupées en deux catégories: les établissements qui visent à redonner une chance à des élèves qui ont eu un parcours difficile et ceux qui prônent un changement de paradigme pédagogique.

 

Des écoles pour une nouvelle chance:

  • Le micro-lycée de la Courneuve (vidéo ici): alors que 17% d’une classe d’âge quittent l’école sans diplôme, le mico-lycée de la Courneuve s’adresse à ceux qui, après une période de pause, souhaitent terminer leur cursus. Ici, ces naufragés du système trouvent des effectifs réduits et une focalisation sur les bases. Mais surtout, les enseignants réussissent à construire une relation de confiance avec ces élèves, notamment en prenant en compte les aléas de leur quotidien au lieu de les exclure de l’expérience scolaire.
  • Le cours Alexandre Dumas (vidéo ici et mon précédant article sur cette école ici): du primaire au collège, des élèves la plupart du temps issus de familles modestes de Montfermeil bénéficient d’une école bien particulière. En utilisant certaines valeurs du scoutisme et en se focalisant sur les bases de l’enseignement (lecture, écriture, maths et histoire), l’équipe pédagogique parvient non seulement à faire progresser des élèves ayant connu des difficultés importantes dans leur(s) établissement(s) précédant(s), mais aussi à les aider à retrouver confiance en eux afin de trouver leur place dans la société.
  • L’école Cerene pour les enfants “dys” (le site ici): on estime à environ 10% le nombre d’enfants atteints de difficultés d’apprentissage telles que la dyslexie, la dyscalculie, la dysorthogrpahie, etc….Ces troubles ne sont pas un manque d’intelligence ou de capacité , mais le personnel de l’éducation national n’est pas formé, ni pour les détecter, ni pour aider ces enfants. Il en résulte souvent une grande souffrance morale pour les élèves et les familles et des résultats scolaires bien en dessous de ce que ces enfants pourraient obtenir s’ils bénéficiaient d’un soutien approprié. L’école du Cerene à Paris est un exemple d’établissement offrant ce genre de méthodes afin de faire progresser les élèves pour qu’ils puissent ensuite réintégrer un établissement “classique”. Cela implique qu’ils aient retrouvé confiance en eux et envie d’apprendre.

Une autre philosophie pour l’école¹

Certaines écoles ne se sont pas données comme but de “repêcher” des élèves en difficulté, mais surtout de ne pas en fabriquer. Ces établissements adoptent des systèmes pédagogiques dont le but est de faire progresser les élèves dans toutes leurs dimensions, aussi bien humaines qu’académiques.

  • La classe maternelle Montessori de Céline Alvarez (vidéo ici): dans cette classe, les enfants de 3 à 6 ans n’étaient pas tenus de suivre un emploi du temps pré-définis par l’enseignant. Chacun vaquait à ses occupations selon l’inspiration du moment et en utilisant un matériel bien spécifique qui lui permettait de recevoir un feedback immédiat sur ce qu’il était en train d’apprendre. Il s’agissait ici de tirer parti de l’envie naturelle des enfants à vouloir apprendre. L’autonomie était fortement encouragée. les résultats furent impressionnants: tous les élèves sortirent de maternelle en sachant lire, écrire et faire des opérations mathématiques à un niveau bien plus élevé que ce que préconise l’éducation nationale. Pourquoi ai-je mis tout ce paragraphe au passé? La classe fut fermée en 2014, malgré ces résultats plus qu’encourageants…
  • L‘école Freinet de Mons-en Baroeul (vidéo ici) : située dans un quartier défavorisé, l’école a rapidement vu le niveau de violence décliner alors que les résultats académiques des élèves atteignaient la moyenne nationale. Auparavant, ces résultats faisaient partie des pires du pays! Les progrès en communication orale furent notamment fulgurants.
  • L’école Decroly de Saint-Mandé (vidéo ici): cette école publique (si, si vous avez bien lu!) a pour caractéristique de favoriser la participation des parents dans la vie de l’école. Réunis au sein d’une association, les enseignants et les parents se rencontrent régulièrement pour discuter de tous les sujets touchant à l’école. Le sentiment d’appartenance à une communauté est un élément essentiel de la pédagogie de Decroly.
  • L’école Waldorf: Ici, il s’agit avant tout de développer la personnalité et la créativité de l’enfant, en respectant les rythmes de la nature. Si les aspects métaphysiques reliés à Steiner peuvent parfois surprendre, dans de nombreux pays comptent les établissements Waldorf font partie intégrale du paysage scolaire sans que cela ne déclenche immédiatement des contrôle de commissions anti-sectes.

Tout en lisant ce livre, je me disais que si tous ces modèles, si différents qu’ils apparaissent, apportent des résultats positifs et concrets, c’est qu’ils doivent quand même avoir des points en commun. Peter Gumbel nous en donne quatre dans sa conclusion:

  1. des enseignants motivés et prêts à s’investir dans le succès de leurs élèves
  2. un travail d’équipe cohérent entre les enseignants
  3. une gouvernance qui a les moyens d’oeuvrer pour l’amélioration constante de l’établissement et qui est responsable de ces résultats
  4. la construction d’une vraie relation humaine et de confiance entre les enseignants et les enfants. Ceux-ci ne sont pas seulement perçus comme des élèves, mais comme des personnes à part entière et ayant de multiples facettes.

C’est donc aussi un portrait en creux que Peter Gumbel dresse de l’école publique. Un portrait en creux pas très attrayant, il faut bien l’admettre…

Et vous? Si vous aviez le choix, quelle école choisiriez-vous pour vos enfants?

 

 

¹ Peter Gumbel aborde également le cas de l’école à la maison. La variété des raisons pour lesquelles les parents décident de scolariser eux-mêmes leurs enfants et la façon dont ils le font sont très disparates. Il est difficile de collecter des chiffres sur l’impact de ce choix. Pourtant rien ne démontre que les élèves réussissent moins bien, ni que la crainte d’un “lavage de cerveau” soit fondée.

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